mercredi 20 octobre 2010

n° 659 : Etre maire à Paris


Etre maire à Paris +++I (N°14 697)

Le 20 octobre 2010, j'ai fini de lire le livre de Dominique BERTINOTTI (entretien avec Jean FERREUX), Etre maire à Paris, Editions Tétraèdre, 2010.

Ce que j'ai aimé :
1°) Ce livre a été écrit par la maire du 4e arrondissement, Dominique Bertinotti, qui est un personnage qui m'a toujours paru un peu énigmatique et avec laquelle je n'ai jamais pu m'empécher d'avoir une distance. Ce livre permet d'en savoir un peu plus sur elle sans tomber dans le "people" auquel se livre certains de nos politiques. J'ai été réconforté d'apprendre que Mme Bertinotti revendiquait une certaine timidité lors de ces débuts en politique (page 67). Etant moi-même relativement timide, cela m'a aidé à comprendre certaines maladresses et le côté "cassant" qui lui est assez souvent reproché par des personnes d'horizons très variés.

2°) J'ai été très intéressé par son parcours personnel. Etant moi-même un enseignant d'histoire-géographiedu secondaire, j'ai suivi attentivement ce qu'elle nous livre de son passé d'étudiante en histoire puis d'enseignante. Cela rend le personnage sympathique et je suis assez d'accord avec elle quand elle regrette le trop grand nombre de politiques qui n'ont jamais vu autre chose que la vie politique et qui en ont fait leur seule profession. En ce qui concerne les recherches historiques, j'ai été très  attentifs aux centres d'intérêt des recherches faites par Mme la maire (le milieu syndical avant la 1ère guerre mondiale) même si pour ma part je me suis plutôt intéressé à des sujets fort éloignés (je suis médiéviste spécialisé dans l'histoire du royaume de Sicile au XIIe siècle. Il est vrai que la vie politique à la cour de Palerme était passionnante aussi à cette époque).

3°) Mme Bertinotti reconnaît qu'elle a pu agacer quand elle a travaillé pour François Mitterrand. J'ai un ami très proche qui a été conseiller spécial de François Mitterrand à la fin de son second septennat et je peux confirmer que la maire du 4e n'a pas gardé que des amis ! Lui comme elle, semblent cependant garder un souvenir durable des échanges qu'ils ont pu avoir avec François Mitterrand. Cet homme avait une profondeur qui a marqué, voire fasciné tous ceux qui l'ont approché. Voilà qui m'interpèle à chaque fois car j'avoue n'avoir jamais ressenti aucun attrait pour ce personnage dont le machiavélisme m'a toujours sidéré. Il est vrai cependant qu'en ce qui concerne la "profondeur" nous n'avons pas été gâté depuis.

4°) Cet ouvrage contient des analyses qui me permettent de comprendre en quoi chacun est façonné par des convictions et un tempérament qui relèvent à la fois de l'éducation et des convictions personnelles. Mme Bertinotti semble avoir gardé intact une foi en l'Homme. Elle évoque page 76 une "indéfectible confiance en l'être humain". J'ose avouer pour ma part qu'une (trop) grande passion pour l'Histoire et l'approche du monde politique (j'ai eu la chance ou la malchance de cotoyer à Sce po des étudiants qui se programmaient déjà pour une "carrière" politique) m'ont conduit plus que jamais à me détourner de toute envie de faire de la politique et de me présenter à une élection. Le temps passant, je crois que ce sentiment ne fait que croître. J'en viens même ces derniers temps à me demander si je dois continuer à aller voter pour les élections nationales.

5°) Dominique Bertinotti n'hésite pas à se "lâcher" sur le milieu hyper machiste de la section socialiste du PS à l'époque où elle y est rentrée (la fin des années 1980). Certains passages sont assez savoureux.

6°) J'ai découvert quelques points communs avec Mme Bertinotti. Ses parents ont été enseignants dans le primaire à Aubervilliers et elle a -un peu- vécu dans cette ville. Cela n'a jamais été mon cas mais j'y suis né et ma famille maternelle est originaire de cette ville qui malheureusement à une triste réputation (comme de nombreuses villes de l'immédiate périphérie Nord et Est de Paris). J'ai des ancêtres albertivillariens sur plusieurs dizaines de générations et je ne peux m'empêcher de ressentir une solidartié avec tout ce qui touche à cette ville.

7°) Autre point commun (mais inversé), la maire nous montre combien par son éducation et sa jeunesse, elle s'est toujours sentie de gauche. Pour ma part, mon éducation a été profondément ancrée dans le camps opposé. Mes parents ont été membre du RPR dès sa création en 1977 et j'ai baigné toute mon enfance dans une section de ce parti. Les premières manifestations dont je me rappelle sont celle de 1984 contre la loi Savary. De même par la suite, en décembre 1986, je faisais partie (à 16 ans) des rares lycéens qui refusaient de faire grève et qui donc obligeaient les profs non grévistes à faire cours. Celle qui est par la suite devenue ma meilleure amie, Corinne, s'en rappelle puisqu'à l'époque nous nous sommes fait la gueule pendant plus d'un an. Elle est depuis devenue institutrice profondément ancrée à gauche ce qui ne nous empêche pas d'être de très vieux amis malgré nos différences de point de vue (j'ai été témoin de son mariage en 2007 à une époque où pourtant nos divergences avaient retrouvé un certain paroxysme).

8°) Il s'agit d'un livre d'entretiens mais malgré cela le livre est très bien écrit avec un style à la fois clair et pertinent... ce qui est loin d'être toujours le cas parmi les politiques.

Ce que j'ai moins aimé :
1°) Bien sûr, on ne peut s'empêcher de penser que cet exercice de vérité masque certaines réalités. Je ne suis pas sûr que les relations de confiances décrites avec le maire de Paris ne relèvent pas seulement de la langue de bois. De nombreux témoignages m'ont fait comprendre qu'entre la garde rapprochée de Bertrand Delanoë et la maire du 4e, les tensions étaient fréquentes (Je tairais bien sûr mes très nombreuses sources sur le sujet !).

2°) Madame Bertinotti parle assez longuement de son cabinet et de son personnel administratif. Je m'étonnne qu'elle ne dise pas un mot de son équipe municipale élue (sauf en remerciement page 115). On trouve à ses côtés plusieurs adjoints et conseillers municipaux avec lesquels je ne partage pas les mêmes convictions politiques mais qui sont vraiment des personnes de qualité (pour n'en citer qu'un je citerai le 1er adjoint Jean-Louis Pourriat).

3°) Madame Bertinotti a des propos très sévères sur le système éducatif français dont elle dénonce le côté "castrateur". J'aurais aimé en savoir plus sur ce qu'elle propose car pour vivre le débat de l'intérieur je continue à me poser quelles solutions sont possibles alors que la profession à laquelle j'appartiens à (oserais-je l'écrire) parfois beaucoup de mal à se remettre en cause.

 4°) Mme Bertinotti évoque une recherche sous la tutelle d'Alfred Grosser sans en dire plus. J'ai pour ma part une énormé tendresse pour ce monsieur d'une très grande humanité. Je me rappelle avec une grande nostalgie les commentaires de l'actualité qu'il donnait chaque semaine à la fin des années 1980 en nous conseillant parfois d'aller voir des vieux classiques du cinéma américain des années 50 au lieu de nous plonger dans des manuels rébarbatifs.

Un livre donc que j'ai trouvé vraiment passionnant et que tous ceux qui s'intéressent au 4e arrondissement devraient s'empresser de lire.

P.S. J'ai en plus la chance d'avoir un exemplaire dédicacé de la maire mais par discrétion je tairais le contenu de la phrase écrite par la première édile de ma ville.

P.S. (bis) : grâce à la campagne des municipales de 2008, j'ai découvert la personnalité d'un autre élu du 4e arrondissement : Vincent Roger et je continue à lui porter une amitié fidèle car je sais ces grandes qualités humaines sans avoir besoin de lire un ouvrage à son sujet.

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