Le Montespan - (N°14316)
Aujourd'hui dimanche 4 octobre 2009, j'ai fini de lire le livre de Jean Teulé, Le Montespan, Press Pocket 2009, édition originale Julliard, 2008. Je m'empresse de faire un article sur ce livre pour l'oublier le plus vite possible.
Ce que j'ai aimé :
1°) La couverture. Ce carosse surmonté de cornes de cerfs par lesquels Montespan a dénoncé sa situation de mari cocu est amusante. Cependant comme tout le livre est pour le moins fantaisiste, on en vient même à se demander si cette histoire est vraie !
Ce que j'ai détesté :
1°) Je n'avais jamais lu de livre de Jean Teulé. Je gardais un bon souvenir de ses chroniques dans l'émission L'Assiette anglaise animée par Bernard Rapp il y a ... déjà pas mal de temps. J'avais entendu dire le plus grand bien des livres de Jean Teulé, notamment son livre sur le poète François Villon. J'ai commencé par "Le Montespan" car m'étant toujours beaucoup intéressé au roi-soleil, je trouvais le thème intéressant. Je suis déçu... Pour écrire comme l'auteur, ce livre est à chier. Il est complètement naze !
2°) Pour appâter son lecteur, Jean Teulé utilise le moyen le plus vil : il passe son temps à se complaire dans des scènes de cul : tout y passe. Dans certains passages, le lecteur finit par baigner dans le sperme... Pour reprendre un des mauvais jeux de mots de l'auteur : "c'est une grande déconnnade !"
3°) L'auteur se pique de truffer l'ouvrage de documents qui donnent à l'ouvrage un aspect érudit. Le risque est que les personnes mal informées sur la période se laissent aller à croire le monceau de bêtises contenues dans ce livre. Quelques exemples :
- page 16 le roi est désigné par le titre "Son Altesse Sérénissime"... Pour le roi de France, on appelait le roi "majesté" et il était désigné par l'expression "Le roi très chrétien". SAS cela fait un peu prince de Monaco !
- page 30 : l'auteur parle "d'une des collines du paysage mollement valloné autour de Saint-Germain-en-Laye"... Pour avoir vécu dans la région pendant 26 ans, je peux assurer qu'à Saint-Germain il y a un plateau mais point de colline !
- page 32 : on apprend que dans les scènes de ballet, le roi Louis XIV endosse "souvent" les rôles de Jupiter... Cela lui est arrivé mais c'est plutôt Apollon qui avait la faveur royal !
- page 74 : dans les années 1660, l'auteur nous parle du confesseur du roi "Le père Lachaise"... L'auteur semble croire que pendant son long règne, seul le père Lachaise a exercé cette charge. Or si le Père Lachaise (célèbre pour avoir donné son nom au cimetière) a bien été confesseur du roi pendant 34 ans, il n'a exercé cette charge qu'à partir de 1675.
- l'auteur nous ressert tous les poncifs hérités de la IIIe République à propos de Louis XIV. Il est sensé être petit (par exemple page 78 ou page 141 : "Le roi sort. Montespan le savait petit mais pas à ce point là") et sale (page 189 :il n'aurait pris qu'un bain dans sa vie). L'historiographie plus récente et les recherches à partir de quelques habits portés par Louis XIV ont montré que le roi avait une taille au dessus de la moyenne (Saint-Simon lui-même, pourtant peu favorable au roi, écrit qu'il était grand) et que pendant toute la 1ère partie de sa vie, il a été fort amateur de bains (notamment... avec Mme de Montespan).
-page 85. Je cite "Montespan, tout en déjeunant, lit la page affaires étrangères du Mercure galant posé près de son assiette". Peut-être garde-t-il la rubrique météo ou les croisés pour plus tard ! On a l'impression que Jean Teulé n'a jamais feuilleté les journaux du XVIIe siècle !
- page 91, alors que l'auteur décrit les débuts de la relation entre la Montespan et le roi, donc vers 1667, l'auteur évoque le château de Marly. Or le terrain de ce château n'a été acheté par le roi qu'en 1676 et les travaux finis... en 1684.
- page 102, on apprend que le traité des Pyrénées de 1659 a donné une partie de la Catalogne à la France. Il est vrai que l'on parle le catalan dans la région de Perpignan, mais il paraît surprenant d'affirmer que le Roussillon est une "partie de la Catalogne"...
- page 191 : A propos des appartements de Madame de Montespan à Versailles : "Elle possède un appartement de vingt pièces au premier étage après la salle du Conseil du roi alors que la reine se contente de onze pièces au second". Là encore c'est du n'importe quoi à l'état pur !! Louis XIV a toujours tenu à ce que sa femme, jusqu'à la mort de celle-ci en 1683, conserve les plus beaux appartements qui donnaient vers le midi (au 1er étage) alors que roi occupait lui l'aile Nord (plus froide). Ce n'est qu'en 1701 que le roi a installé sa chambre au centre du palais.
- page 214, on touche le fond de l'inculture. Montespan se rend en Espagne où il est reçu par le "dauphin" d'Espagne. C'est seulement en France que l'héritier du roi était ainsi appelé depuis qu'au XIVe siècle le dauphiné a été rattaché à la France. De plus certes, depuis la mort de Philippe IV, le père de l'enfant dont parle Jean Teulé, la régence était exercé par la veuve mais l'auteur semble ignorer qu'en titre Charles II est déjà roi : "le dauphin -âgé de 10 ans- le futur Charles II". Philippe IV étant mort en 1665 et Charles II étant né en 1661, il est devenu roi à l'âge de 4 ans...
- page 234 : Jean Teulé insère dans le livre une très belle reproduction du chantier de Versailles. Depuis la place d'armes, le marquis de Montespan voit avec une lunette le roi Louis XIV profiter d'une fellation servie par Mme de Montespan. On comprend par la suite que l'endroit désigné est sensé correspondre aux appartements d'Etat (page 237 : "il sort de l'antichambre et entre dans la salle du conseil où l'attendent ses ministres"). Le problème est que la flèche est situé dans une des ailes latérales (des ministres) dans laquelle on peut être certain que le roi n'a certainement jamais mis les pieds !
- page 247 : à propos du Trianon (je suppose) construit sur les ordres de Louis XIV "un palais de mosaïque chinoise à trois millions d'écus". Je croyais qu'il s'agissait de porcelaine... la mosaïque est elle plutôt une spécialité romaine ou byzantine.
- page 257... la reine Marie Thérèse est sensé parlé de la "tupe" parce que paraît-il elle parle mal le français et confond les "t" et les "p"... Le problème c'est que "pute" en espagnol ça se dit "puta"... donc à moins d'être complètement débile, on voit mal comment elle pourrait intervertir les lettres !
- page 301 : au moment de la mort de Mme de Montespan en 1707, le roi est sensé remercié le marquis d'Antin le fils légitime, de M. de Montespan et de Mme de Montespan,car il aurait détruit les lettres écrites par le marquis. "le roi qui l'a appris va m'offrir une chaussée à Paris. Rendez-vous compte... La chaussée d'Antin"... L'anecdote m'a paru fort suspecte. Vérification faite, cette voie n'est devenue qu'une rue qu'en 1720... Elle était située près de l'Hôtel d'Antin et n'a pris le nom de "rue de la chaussée d'Antin" qu'en 1816. Bref aucun rapport avec le Roi-Soleil !
4°) Des exemples du style de l'auteur :
- page 131 : dans un des bordels de Paris : "Toutes les grues trop pourries du quartier, refusées jusque-là par les bouchers qui pourtant ne sont pas regardants (mais la quand même il ne faut pas exagérer), le marquis les réclame pour lui". La parenthèse montre le style merveilleux de l'auteur.
- page 219 : "L'opinion du gascon est faite. Le futur Charles II n'a pas d'humour et ne se fout pas de sa gueule. Il est complètement con".
Ce qui me désole est que ce livre a reçu le prix de la Maison de la presse en 2008. Il a été élu parmi les 20 meilleurs livres de la rédaction du magazine Le Point en 2008 (C'est décidé je cesse d'acheter ce magazine à propos duquel j'avais cité sur un autre blog une belle stupidité écrite à propos cette fois du XIIe siècle).
. Pire du pire, j'ai entendu des personnes dire qu'elles avaient apprécié ce livre car elles en avaient appris énormément sur le règne de Louis XIV. Ce livre ce n'est pas de l'Histoire. C'est de la FICTION ! Tant pis si je passe pour un fât mais ce genre de littérature me désole. Pour la 1ère fois de ma vie, je vais faire un acte que je n'ai jamais fait jusque là : je vais me débarasser d'un livre car "j'aurais les boules" (pour écrire à la manière de l'auteur) s'il figurait dans ma bibliothèque.
Rédigé le 04/10/2009 à 21:15
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