samedi 20 mars 2010

n° 612 : Pie XII et la Seconde Guerre mondiale


Pie XII et la Seconde Guerre mondiale +++ (N°14 483)

Le 19 mars 2010, j'ai fini de lire le livre de Pierre BLET, Pie XII et la Seconde guerre mondiale, Tempus 2005, 1ère édition Perrin, 1997.

Ce que j'ai aimé :

1°) Ce livre écrit par un historien qui a eu accès aux archives vaticanes permet de mieux connaître l'action d'un personnage aujourd'hui décrié : le pape Pie XII (1939-1958). A la lecture du livre, on peut penser que celui-ci ne mérité peut-être pas les racourcis historiques de journalistes que je continue à considérer comme peu compétent pour faire de l'Histoire.

2°) L'auteur rappelle fort justement que l'Eglise catholique elle-même a souffert de persécution de la part du régime nazi. On peut s'en rendre compte en lisant le livre sur la résistance allemande que j'ai lu récécemment (voir l'article du 31 janvier 2010). Ici, dans ce livre sur Pie XII, on apprend par exemple que lors de l'Anschluss de 1938 (l'annexion de l'Autriche), le cardinal archevêque de Vienne a été insulté par les Nazis et le lendemen le palais archiépiscopal a été pillé (page 65). Pie XII a ainsi toujours dû veiller à ce que ses prises de position n'aggrave pas le sort des catholiques sous domination allemande. En Pologne, après l'invasion allemande ET soviétique de septembre 1939, un nombre impressionnant de membres du clergé catholique ont été arrêtés et nombreux sont morts dans les camps de concentration ou dans les goulags quand ils n'ont pas été directement éliminés (page 84).

3°) J'ai appris que les îles Hawaï avaient été occupées par le Japon et qu'elles avaient capitulé le 22 décembre 1941.(page 147).

4°) En raison des alertes envoyées à Washington par le Vatican qui laissaient entendre l'existence des Chambres à gaz, c'est le Secrétarait d'Etat américain qui le 30 août 1943 affirmait : " Il n'y a pas de peuves suffisantes pour justifier une déclaration concernant l'exécution en des chambres à gaz". (page 189). Un peu plus loin l'auteur affirme "Cette ombre persistante sur la destination inconnue ne fut jamais pour Pie XII un prétexte à abondonner les persécutés à leur destin. Il mit au contraire en action tous les moyens dont il pouvait disposer pour les sauver (...). Il ne parlait pas, il agissait."

5°) Page 226, l'auteur cite une lettre adressée par le Grand rabbin de Jérusalem après les interventions du Pape pour sauver les Juifs de Roumanie et d'Europe centrale : il lui envoie "ses remerciements sincères ainsi que son appréciation profonde de son attitude si bienveillante envers Israël et de l'aide tant valable rendue par l'Eglise catholique au peuple juif en péril" (22 novembre 1943) (page 227).

6°) Le pape a permis à Rome d'échapper à une destruction : à sa demande, les alliés ont peu bombardé la Ville Eternelle (même si la basilique Saint-Laurent-hors-les-murs a beaucoup souffert du bombardement du 19 juillet 1943).

7°) En septembre 1943, après l'invasion allemande de Rome, les nazis ont exigé que la communauté juive de Rome fournisse 50 Kg d'or en 24h sous peine de la déportation immédiate de tous les hommes. Comme elle ne pouvait réunir que 35 Kg d'or, "le grand rabbin de Rome, Zolli, fit directement appel à Pie XII, qui donna l'ordre de faire le nécessaire pour rassembler les quinze kilos manquants.". Cet épisode est très rarement évoqué (page 242).

8°) L'auteur montre comment le Vatican est (un peu) intervenu auprès des autorités de Vichy pour dénoncer le statut des Juifs, surtout dans sa version renforcée du 2 juin 1941.

9°) Dans ses Mémoires de guerre, Charles De Gaulle est très élogieux envers Pie XII : "Pieux, pitoyable, politique au sens le plus élevé que puissent revêtir ces termes, tel m'apparaît, à travers le respect qu'il m'inspire, ce pontife et ce souverain" (page 279) et plus loin "Pie XII juge chaque chose d'un point de vue qui dépasse les hommes, leurs entreprises et leurs querelles" (page 326).

10°) Le représentant américain du président Roosevelt, qui s'appelait Tittmann, a affirmé peu avant sa mort " Je ne peux m'empêcher de penser qu'en évitant de parler, le Saint Père a fait le bon choix ; il a sauvé bien des vies". (page 322). Robert Knemper, ancien délégué des Etats Unis au conseil du tribunal des crimes de Nuremberg a lui aussi affirmé "Tout essai de propagande de l'Eglise catholique contre le Reich de Hitler (...) aurait hâté l'exécution d'encore plus de Juifs et de prêtres".

Ce que je n'ai pas aimé :

1°) L'auteur instruit uniquement à décharge. Il aurait été intéressant qu'il évoque ce que d'autres reprochent à Pie XII.

2°) La couverture montre ce qui semble être Pie XII avec un soldat allemand. En fait, il s'agit de l'époque où il était nonce du pape Pie XI à Berlin, de nombreuses années plus tôt. Je trouve la couverture un peu ambigüe et racolleuse... Peut-être un choiux de l'éditeur !

3°) L'auteur est plutôt bienveillant pour le maréchal Pétain. D'après ses sources, Pétain a pris "sous la pression allemande" les mesures antisémites (page 262). Il me semble que ce n'est pas du tout exact et que certains Français ont volontairement pris ces dispositions.

==> Ce livre montre que sur cette période, il est difficile d'avoir des jugements très tranchés concernant ce qu'on aurait dû faire ou ne pas faire contre le Nazisme. Il est facile pour certain de donner des leçons plus de 60 ans après !

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